Ma vie de frontalière à Lausanne : mes impressions au bout de deux mois
Deux mois que je travaille à Lausanne.
Deux mois que j’ai ouvert un nouveau chapitre de ma vie. Ces dernières années, ils se succèdent, à m’en donner le tournis. Mais je crois que c’est ce que j’aime, cette impression d’avoir vécu mille et unes vies.
Mon travail
Pour celles et ceux qui ne le savent pas encore, j’ai commencé un nouveau travail dans l’édition et le marketing. À vrai dire, sans aucune formation, sans aucune connaissance. Justement, je voulais apprendre. Parce que j’ai vu à quel point ces domaines étaient utiles, lorsque j’étais à mon compte. Je pensais le marketing futile, superflu, je suis aujourd’hui convaincue qu’il est essentiel pour vendre - un produit ou un service.
Pendant des mois, on m’a sommé de trouver un emploi à Genève, plus proche, plus pratique, plus rapide de mon nouveau chez moi - la Haute Savoie. En vain. C’était Lausanne qui m’appelait, qui m’intéressait, cette boîte là, spécialisée dans le bien-être et la santé naturelle. Une petite équipe. C’était cohérent, c’était la suite logique.
Pour être honnête, j’ai retrouvé une stabilité, un socle, un cadre dans lequel m’épanouir. J’ai retrouvé un rythme, j’ai retrouvé le feu de vie dans ma poitrine. Je peux me projeter, avoir des projets. Prévoir mes vacances sur l’année. Je crois que ça m’avait manqué.
On nous dit que le salariat est une prison, je crois personnellement que ça peut aussi être une libération.
Pourquoi être frontalière ?
LA question que l’on me pose le plus souvent. “Pourquoi ne pas travailler en France ? Pas loin de chez moi pour m’éviter tous ces trajets? Est-ce seulement pour l’argent? Si oui, est-ce-que ça vaut vraiment le coup?”
Après réflexion, je crois qu’il y a 2 raisons principales à cela :
Le coût de la vie
Le coût de la vie en Haute-Savoie est vraiment élevé, c’est peut-être même une des régions les plus chères de France : le logement, la nourriture, l’essence, les activités, l’esthéticienne même… tout est plus cher. Pas du simple au double, mais tout de même.
D’autant plus que nous vivons proches de la frontière avec Genève : beaucoup de suisses vivent dans le coin et presque tout le monde travaille en Suisse. Le pouvoir d’achat est donc très élevé et donc forcément les prix augmentent.
Du coup, vivre dans ce coin avec un salaire français est assez compliqué. Disons que ça n’a pas vraiment d’intérêt, selon moi. Autant vivre ailleurs, plus loin de la frontière, là où les prix ne sont pas si élevés.
Pourquoi sommes nous allés aussi proches de la frontière me direz vous? Parce que mon copain vient de cet endroit, qu’il y a toute sa famille, tous ses amis, c’était donc l’endroit logique pour nous installer. On avait une base. Et puis c’est magnifique.
J’avais même regardé les opportunités professionnelles à Annecy, certaines m’intéressaient, mais entre le temps de trajet et le coût de l’essence, ça ne valait pas le coup. À la même distance, autant aller en Suisse pour gagner le double voir le triple.
Les opportunités professionnelles
Il y a beaucoup de belles opportunités professionnelles à Genève et Lausanne. On retrouve l’ONU et toutes les institutions internationales à Genève, mais aussi toutes les banques et entreprises comme Société générale, Rolex, … pour ne citer qu’elles. Il y a beaucoup de travail dans la finance j’ai l’impression.
À Lausanne c’est plus petit. Il n’y a pas les sièges des grandes entreprises, mais plutôt des start-up ou petites et moyennes entreprises. Il y en a beaucoup dans le bien-être, un sujet totalement décomplexé en Suisse. Les thérapies alternatives sont même remboursées par les assurances, comme la naturopathie, l’hypnose etc. Il y a donc un vrai vivier là-bas.
C’est ce qui m’a attiré personnellement. Après avoir travaillé 1 an dans une grande banque (entre 2022 et 2023), je voulais voir ce que c’était que de travailler pour une plus petite structure, pour essayer. Le côté humain m’attirait. Dans mon entreprise nous sommes une petite vingtaine et c’est ce qui me plaît: tout le monde se connaît, on a de vraies responsabilités et on nous laisse de la flexibilité.
Je n’aurai pas pu trouver une opportunité comme celle-ci en restant près de chez moi, à moins d’aller à Annecy peut-être (à 50 minutes de route tout de même, et avec un moins bon salaire).
Les avantages
Je crois que l’avantage principal, on ne va pas se mentir, est le salaire. À Genève, le SMIC vient de passer à 4000€ pour vous donner un ordre d’idée. Il y a beaucoup de charpentiers, maçons, agents de rayon etc qui vivent en France mais travaillent en Suisse, parce qu’évidemment le salaire ne pourrait jamais être aussi élevé en France.
Il y en a aussi beaucoup qui font un mi-temps. Ça permet d’avoir un bon salaire pour la France, en travaillant seulement quelques jours par semaine. Pour tous les postes de « cadre » (je mets des guillemets parce qu’il n’y a pas de statut cadre en Suisse, en tout cas pas dans le canton dans lequel je travaille), le salaire peut monter à 100k par an voire plus.
Évidemment il n’y a pas que l’argent dans la vie, mais c’est vrai que pour mener à bien des projets, que ce soit investir dans l’immobilier, mettre de l’épargne de côté, se payer de beaux voyages ou juste vivre correctement, il en faut. Et je trouve que c’est un bon moyen d’y arriver. C’est un bon compromis, parce que comme je l’ai dit juste avant, il y a de belles opportunités professionnelles. C’est possible de s’épanouir professionnellement tout en ayant un bon salaire. D’une pierre deux coups je trouve.
Les inconvénients
Malheureusement, il y a quand même plusieurs inconvénients à être frontalière, et pas des moindres. Je vous parle de ceux que j’expérimente et que je considère comme tels, mais peut-être que pour d’autres ce ne serait pas du tout un problème.
Le coût de l’assurance
Quand on travaille en Suisse, on est obligés, en tant que frontalier, de prendre une assurance Suisse. Le minimum à ce jour est de 180€ par mois, et va passer à 260€ début janvier 2025.
Certes les salaires sont élevés mais c’est un sacré coût tout de même. C’est pour ça que j’entends souvent, depuis que je suis dans la région, que ça ne vaut pas trop le coup d’accepter un job en Suisse qui paye moins de 3000€. Il faut penser à tous les coûts qu’il y a à côté.
Les trajets
Je crois que c’est, pour moi, le pire. Comme il y a de plus en plus de frontaliers chaque année (+ 20 000 par an environ), il y a forcément beaucoup (beaucoup) de monde sur la route.
De chez moi, pour aller à Genève il faut environ 30 minutes. Le matin, à moins de partir avant 6h, les gens mettent 1h30. Pareil pour Lausanne, en temps normal c’est à 1h30 de route, mais aux heures de pointe il faut compter 3 heures.
Et les heures de pointe commencent à 6h le matin jusqu’à 9h, et reprennent de 16h à 19h30…
Je trouve que c’est un point vraiment important à souligner, parce que ça induit soit de passer beaucoup de temps dans les transports, soit d’être ok avec le fait de se lever très tôt et de rentrer très tard chez soi le soir. À chacun de calculer si, pour le salaire, ça en vaut le coup.
Personnellement, le trajet pour aller à Lausanne est un vrai parcours du combattant. 4 heures par jour, aller-retour. Voiture, train, marche. Matin et soir. Il y a des couts, c’est sûr, en terme de temps, de relations. Je vois moins mon copain, je vois moins mon chaton grandir, je vais moins courir. Je cuisine tout à l’avance, le week-end, car je n’ai plus le temps en semaine. Je pars il fait nuit, je rentre il fait nuit. Mais j’y trouve mon compte à ce jour, et puis avec le télé travail quelques jours par semaine ça facilite tout.
C’était d’ailleurs pour moi un critère essentiel, je préférais travailler plus loin, à Lausanne, mais avec une possibilité de télé travail, plutôt qu’à Genève certes plus près mais 5j/5 au bureau. Je me connais et je sais que ces trajets m’épuisent, mais il faut faire en fonction de chacun.
Le coût des transports
Comme je l’ai dis juste avant, chaque matin et chaque soir je prends le train pour aller à Lausanne. Le train Suisse. Autant vous dire que ce ne sont pas les mêmes prix là aussi. Par mois, je paye 350€ de train, et encore c’est le moins cher des abonnements. À cela il faut compter l’abonnement au parking où je garde ma voiture chaque matin, à 120€ par moi.
500€ de transport par mois, sans compter l’essence. C’est tout de même un sacré coût, en terme d’argent et de temps. C’est pour ça qu’il faut vraiment être ok avec ça et calculer le salaire dont on a besoin pour compenser tous ces frais.
Pourquoi Lausanne ?
Il y a beaucoup de frontaliers qui vivent à Thonon ou Evian, juste en face de Lausanne, de l’autre côté du lac Léman. Chaque matin, ils font la traversée en bateau. Ils en ont pour 30 minutes. Ça doit être vraiment génial de venir au boulot en bateau. J’habite malheureusement trop loin pour pouvoir le prendre mais j’ai quand même choisi Lausanne malgré la distance.
J’adore cette ville, cette petite ville calme, charmante, jeune et dynamique à la fois. Il y règne une ambiance tellement apaisante. Ce n’est pas la folie parisienne mais j’aime le fait que ce soit calme tout en étant dynamique professionnellement parlant. C’est un bon compromis je trouve.
Le centre historique est charmant, avec de beaux bâtiments et des vestiges d’antan. Des guinguettes, des parcs, une imposante cathédrale. Il y a des endroits branchés, jeunes, où boire un verre après le travail ou faire soirée.
En bas, il y a le lac. Le point phare pour moi. La vue sur les Alpes est imprenable, il paraît qu’en hiver, les sommets sont enneigés. Le contraste avec le lac doit être incroyable. Il y a tout ce que j’aime, en un seul endroit : l’apaisement du lac et la puissance des montagnes. Il y a même des endroits dédiés où se baigner dans le lac, j’en vois certains faire leur longueur, le matin, tranquillement. Ça sent bon la mer, quand on longe le lac ou qu’on se pose au parc, juste en bas. C’est vraiment paradisiaque.
Il y a aussi beaucoup d’événements qui sont organisés: des festivals, des cours de sport en plein air, des expositions culturelles. Il y a tout à Lausanne, dans le calme. Je pourrai y vivre honnêtement. si ma vie n’était pas en haute Savoie. J’y serai bien c’est certain.
Par contre, la vie est vraiment très chère ici. Ce n’est pas un mythe. Les loyers sont parmi les plus chers d’Europe, la baguette de pain coûte 5€ et il est difficile de trouver un restaurant servant des plats à moins de 25€. C’est pour ça aussi que beaucoup de gens sont frontaliers, même des Suisses, et que le SMIC est aussi élevé.
Je n’ai pas ressenti la même chose pour Genève. Plus cosmopolite, plus internationale, plus de grosses entreprises, mais moins de charme et moins de calme. Par contre, là bas aussi, l’environnement de travail doit être incroyable: aller faire un plongeon dans le lac entre midi et deux, dîner les pieds au bord de l’eau le soir, assister à tous les événements organisés par la ville (beaucoup!)… il y a même des barbecues mis en place par la commune au bord du lac pour les afterwork! Il y a de quoi faire, pour qui aime la vie citadine.
J’espère en tout cas que ces lignes vous auront pu vous donner quelques idées de la vie en tant que frontalière à Lausanne et de ses opportunités professionnelles. Pour l’instant j’en suis vraiment plus que ravie et je prie pour que ça continue comme ca.
En attendant je vous dis à la semaine prochaine pour un nouvel article!
Florine